« les reformes de la justice doivent se poursuivre avec plus d’ardeurs »
Dr Mamady Kaba, président de l’Institution Nationale Indépendante des Droits Humains (INIDH) a accordé cette semaine une interview exclusive à notre reporter au cours de laquelle, il s’est largement exprimé sur certaines actualités brulantes de la cité notamment, la crise de la CENI, les vindictes populaires en Guinée et sur le contenu de son livre qui sera bientôt présenté au public guinéen. Lisez !
Quel est votre avis sur l’arrêté de la Cour constitutionnelle confirmant la destitution de Bakary Fofana à la tête de la CENI au profil de Me Amadou Salif Kébé ?
Dr Mamady Kaba : Je respecte profondément la Cour constitutionnelle et ses décisions. Pour cela, je félicite Me Kébé en tant que président de l’institution électorale.
Je félicite aussi Bakary Fofana pour son ‘’fair-play’’ et, j’invite l’ensemble des commissaires à désormais taire définitivement tous les petits conflits, les guerres de positionnement, les querelles de personnes pour se tourner résolument vers l’organisation d’élection locale qui nous tient à cœur. Parce que le temps presse. Je lance aussi un appel à Me Kébé pour qu’il ne fasse pas aux chasses aux sourcières.
Il n’a plus d’adversaires, il n’a pas de partisans, il n’a pas d’ennemies au sein de la CENI. Il n’a que des collaborateurs. Je l’appelle à prendre toutes ses responsabilités pour que la CENI retrouve son unité d’action, afin que le défis des élections soit relevé.
Nous avons besoin aujourd’hui d’avoir les élections communales et communautaires dans les meilleurs délais. Il faut que ces élections puissent produire des élections qui sont acceptables de toutes les parties.
Je pense qu’après la décision de la Cour constitutionnelle, les politiques doivent continuer à fournir des efforts pour rendre l’environnement assurant pour que la confiance mutuelle se renforce et la confiance à l’endroit de la CENI se renforce aussi aux yeux de tout le monde, afin que nous puissions avoir des élections communales et communautaires sans violence et dans les meilleures conditions.
Cette CENI a toujours été jugée par certains d’incompétente, est-ce que vous, vous la faite confiance ?
Dr Mamady Kaba : La CENI est l’organe qui organise les élections entre les différents partis politiques qui font la compétition. Donc c’est à eux de trouver les moyens de rendre la CENI plus crédible aux yeux de tous.
Ça, ce sont des décisions politiques, des négociations qui se passent entre le pouvoir et l’opposition pour trouver le meilleur contexte dans lequel, on peut avoir des élections dont les résultats seront acceptés de toutes les parties.
Nous allons changer de sujet. Quelle lecture, faites-vous de la persistance des populations guinéennes qui se font justice ?
Dr Mamady Kaba : C’est vraiment un malheur pour notre jeune démocratie. J’en parle d’ailleurs dans mon livre, c’est une catastrophe que les populations se désespèrent de notre système de justice au point de se donner justice à elle même.
C’est pourquoi, je pense que les reformes de la justice doivent se poursuivre avec plus d’ardeurs. Il faut en dehors des reformes un terme du système. Il faut créer un rapport de confiance entre l’institutions judicaires et les populations en mettant en place des bureaux d’assistants judiciaires et juridiques sous la coupole de l’institution des droits de l’homme dans les cinq communes de la capitale et les préfectures du pays.
Il faut préciser que ces commissions-là se chargeront de conseiller les victimes, de les accompagner à la justice, de suivre l’ensemble du processus jusqu’à ce que les victimes soient rétablies dans leurs droits.
Cela va permettre au fur et en mesure de changer la perception que les populations ont à l’endroit de notre système global de justice. En ce moment, petit-à-petit, la confiance sera rétablie entre les deux parties et, cela amènera les populations à renoncer aux vindictes populaires.
Depuis le début de l’année 2017, nous constatons la récurrence de l’insécurité en Guinée. Qu’en pensez-vous ?
Dr Mamady Kaba : Oui, l’insécurité, elle est très préoccupante. Ce qui est plus préoccupant, c’est l’insécurité routière. Parce qu’il y a beaucoup de complaisances des agents de l’Etat sur la route.
Les agents de l’Etat se comportent comme des chasseurs en brousse. Des chasseurs à la recherche du gibier. Quand il regarde la circulation, ce n’est pas la fluidité de la circulation qui les intéresse.
Ce n’est pas la sécurité des usagers de la route qui les intéresse, c’est plutôt le petit butin qu’il pourrait obtenir et, mettre en poche qui les intéresse.
C’est ce qui fait qu’il y a trop de complaisances de la part des agents des forces de l’ordre et aussi, il y a une absence totale de contrôle technique des véhicules.
C’est ce qui fait que vous pouvez avoir un véhicule pendant dix ans vingt ans, vous n’allez pas au garage. C’est lorsque vous en constatez une panne qu’il faut tout de suite aller au garage.
Vous ne faites rien pour prévenir les pannes. Vous ne faites que réparer les pannes. Parce qu’il n’y a pas un système organisé dans le pays pour les contrôles techniques qui pourraient mettre les véhicules en bon Etat.
Il y a aussi les états de nos routes qui sont complètement dégradés et, ne favorisent pas une circulation à grande vitesse.
Les coupeurs de routes sont là pour tuer les usagers de la route. Les chauffeurs sont imprudents, ils conduisent à tue-tête sur des routes qui ne sont pas faites pour cela.
Tout cela contribue à rendre la sécurité des citoyens très précaire. Je pense que ce sont des problèmes qu’il faut prendre à bras le corps.
C’est un tout qu’il faut résoudre. Il faut donc, des états généraux de la circulation routière pour voir les solutions à apporter à ces différents problèmes.
Parlons à présent, de la littérature. Vous venez de diffuser un livre titré ‘‘Face aux défis de la Démocratie’’. Pouvez-vous parler du contenu de ce livre ?
Dr Mamady Kaba : C’est un livre qui a été édité aux éditions Universitaires Européenne en Allemagne, il va être bientôt lancé en Guinée, probablement la semaine prochaine.
Dans le livre comme son titre l’indique, ‘’Face aux Défis de la Démocratie’’, j’essaye de faire ressortir les difficultés que la Guinée rencontre pour se lancer en plein dans la démocratie.
Les défis qui sont en train d’être relevés qui se posent en terme de gouvernance, en termes d’institutionnalisation, en terme de reforme des armées, en terme de réconciliation Nationale.
Au fait, l’ensemble des défis qui se posent à nous, c’est que nous devons surmonter pour être véritablement un Etat démocratique et un Etat de droit.
Qu’est ce qui vous a motivé à écrire ce livre ?
Dr Mamady Kaba : La motivation est que notre pays a connu beaucoup de souffrances dans le passé et nous n’avons pas eu la démocratie dans un plateau d’or.
Nous l’avons conquis de très hôte lutte. La Guinée a connu beaucoup de victimes, beaucoup de blessés, des handicapés à vie, des fils uniques des familles déshérités qui ont été tués ou handicapés à vie.
C’est le désespoir, c’est la destruction des biens etc. Donc aujourd’hui, nous sommes à une phase nouvelle et, nous devons continuer à réussir notre marche démocratique, afin que les aspects douloureux de notre passé ne se reproduisent plus.
J’ai voulu à travers ce livre contribuer à Conakry mondiale du livre qui se tient actuellement chez nous et, à l’édification d’une démocratie solide en Guinée.
Votre dernier mot à l’endroit de la population guinéenne.
Dr Mamady Kaba : J’appelle la jeunesse guinéenne à renoncer à la violence. A participer à la construction de la démocratie et, de l’Etat de droit.
Je lance aussi un appel à l’ensemble de la classe politique pour que le discours public soit mieux soigné et mieux adapté à notre volonté de justice et de démocratie.
J’appelle aussi l’ensemble des dirigeants du pays à promouvoir le respect des lois. A prioriser le dialogue et la concertation.
A faire tous les efforts possibles pour que nous ayons les élections communales et communautaires dans les meilleurs délais et dans les meilleures conditions.
Interview réalisée par Ibra Barry pour ScoopGuinée
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