C’est, en principe, aujourd’hui, 1er juillet 2020 que les pays membres de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) rouvrent leurs frontières fermées en raison de la pandémie du Covid-19. Comme l’on peut s’en douter, l’évènement est des plus attendus car les déplacements des populations à l’intérieur de l’espace communautaire, répondent à de nombreux impératifs. Alors que le gros des flux migratoires satisfait des besoins économiques, les populations, dans l’espace, restent liées par d’importants liens sociaux et culturels. En effet, de nombreux peuples se répartissent de part et d’autre des frontières qui leur paraissent totalement artificielles. C’est le cas des Bwaba, par exemple, qui sont à cheval entre le Burkina et le Mali ou encore des Yoruba entre le Bénin et le Nigeria. A cette réalité des populations qui ont en partage le même espace géographique, viennent s’ajouter les liens créés par l’histoire récente du continent, notamment la colonisation ou encore les conflits qui se sont soldés par des flux importants de réfugiés qui, malgré tout, gardent d’importantes attaches avec la mère-patrie. On ne peut pas non plus occulter les besoins en éducation, qui occasionnent une grande circulation des étudiants entre les pays de la CEDEAO. C’est donc dire si cette réouverture des frontières est importante aussi bien pour la reprise de l’activité économique qui reste largement tributaire de la circulation des hommes, que pour la vie sociale des populations dont certaines ont été séparées de leurs familles quand les barrières frontalières ont été érigées. Mais au-dessus des sentiments de joie qui ne manqueront pas d’accompagner cette mesure de levée des barrières aux frontières de l’espace communautaire, planent de gros nuages.
Il appartient à chaque Etat de prendre les mesures qu’il faut à ses frontières pour protéger ses populations
En effet, la pandémie du Covid-19 est loin d’être maîtrisée. Certains pays comme la Côte d’Ivoire et le Ghana, par exemple, atteignent même des records jusque-là inégalés. Il y a donc de sérieuses raisons d’inquiétude, de voir les efforts consentis par les pays où la situation était plus ou moins sous contrôle, être anéantis par une nouvelle explosion des chiffres, liée à la reprise du trafic routier entre les différents Etats. Quand on connaît la faiblesse des infrastructures sanitaires et l’impact socio-économique de la pandémie, l’on se demande si l’on ne court pas tout droit vers le scénario-catastrophe qu’avait prédit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l’Afrique au début de la pandémie. La question que l’on est en droit de se poser, par conséquent, est la suivante : quelles mesures la CEDEAO a-t-elle prises pour préparer l’ouverture des frontières en vue d’éviter une nouvelle flambée de la maladie ? On le sait, sous d’autres cieux, l’entrée dans certains pays est conditionnée par le test du Covid-19 attesté par un certificat médical. A-t-on envisagé pareille mesure dans l’espace communautaire ? La question reste posée. Par ailleurs, les compagnies de transport devraient être aussi mises à contribution pour freiner la propagation de la maladie. La CEDEAO a-t-elle prévu, à cet effet, un dispositif avec ces dernières avec, le cas échéant, des mesures de répression pour les contrevenants? Les interrogations sont nombreuses et restent, pour l’instant, sans réponses, donnant l’impression que l’organisation communautaire a mis la charrue avant les bœufs. Et quand bien même ces réponses existeraient, elles devraient faire l’objet d’une grande campagne médiatique avant l’ouverture des frontières dans un but de sensibilisation des populations. Mais comme on le dit, « il n’est jamais trop tard pour bien faire ». Car, en attendant, comme le dit cette autre sagesse populaire selon laquelle « quand le caillou tombe du ciel, chacun se protège la tête », il appartient à chaque Etat de prendre les mesures qu’il faut à ses frontières pour protéger ses populations.
« Le Pays »
Commentaires récents