On pensait que tout avait été dit au sujet de l’avion de la défunte compagnie Air Guinée que l’Etat guinéen avait vendu à Mamadou Sylla, à l’époque homme d’affaires prospère et proche du président Lansana Conté. Mais il y a un aspect important de ce dossier que l’opinion ignorait jusque-là, alors que l’acquéreur dit à qui veut l’entendre que le prix (5 000 000 de dollars) auquel il avait accepté de reprendre le boeing était exorbitant.
Dans un entretien qui nous a été accordé ce dimanche, le PDG de Futurelec a regretté un «investissement à perte », avant d’expliquer dans quelles conditions l’appareil a fini ses jours en France, seulement deux ans après.
«L’avion-là même qu’est-ce que ça m’a servi?, s’interroge-t-il au micro de Guineenews. Et de répondre à sa propre question, «Rien», avant de déplorer que les gens ne se posent pas cette question. Et l’homme d’affaires devenu leader politique déclare que «(…) l’avion était une épave », précisant de passage que «je ne savais même pas parce que je ne me connais pas dans le secteur d’avion ».
Poursuivant sa narration, «ça vient, ça vole un peu, et puis, on dit qu’il faut envoyer faire le check C », confie-t-il et d’expliquer que «le check C, c’est vraiment un entretien très profond. Si non, il y a check D. Mais quand on te dit check C, quand ça dépasse là-bas, c’est qu’il faut jeter».
Ce n’est pas tout. Dans cette lancée, le PDG de Futurelec révèle que «je fais un contrat de base avec l’atelier, cette fois-ci en France, à perpignan. Le contrat de base était à 300 000 euros pour refaire l’avion. L’avion part, mais quand ils l’ont démonté, ils ont évalué les travaux, ils ont multiplié le prix par 10. Donc au lieu de 300 000 il fallait payer 3 000 000 d’euros, l’équivalent de 4 000 000 de dollars à l’époque. J’ai vu que les 5 plus 4 000 000 de dollars, allaient me faire 9 000 000 de dollars. J’ai dit que si c’est comme ça, je ne peux pas, je préfère en acheter un autre, remettez-moi mon avion. Ils ont dit non, qu’ils l’ont démonté et que c’est obligatoire, il faut que ce soit réparé ».
Face à l’immensité du montant à débourser, alors qu’à deux millions il pouvait s’acheter un autre avion plus récent et en meilleur état, en tout cas selon les explications de notre interlocuteur, «je porte plainte contre la société française en France. J’ai gagné le procès en première instance. Il y a eu appel, et la décision de la première instance a été cassée. Ils ont voulu protéger leur compatriote. Il y a eu saisie conservatoire et après ils disent qu’il faut payer l’argent si non, l’avion ne bouge pas, alors que quand j’ai gagné en première instance, je pouvais reprendre l’avion… »
A la question de savoir s’il avait payé les 3 000 000 d’euros, Mamadou Sylla répond sans ambages que: «non, c’est resté là-bas jusqu’à maintenant ».
Un coin du voile levé pendant que le PDG de Futurelec déplore que ce sujet refait constamment surface sur fond de polémique, alors que le rapport d’un audit fait au milieu des années 2000 par le cabinet FFA, à la demande de l’Etat guinéen et sa société, sur recommandation des partenaires au développement, permet de tirer les causes au clair.
A noter que selon Wikipédia, « C-Check désigne l’inspection, la révision, la réparation, la préservation et le remplacement des parties de l’avion , y compris la maintenance préventive , identifiée comme un bloc C complet dans les manuels de maintenance et les documents de planification du constructeur de la cellule. Cette vérification complète du bloc C doit inclure toutes les inspections structurelles, le contrôle de la corrosion et les autres travaux normalement effectués en conjonction avec chaque vérification du bloc C ».
Mohamed Sacko
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