A l’occasion de la journée internationale de la liberté de la presse, célébrée le 03 Mai de chaque année, le ministre de l’enseignement technique, de la formation professionnelle de l’emploi et du travail (ETFPET), Albert Damantang Camara, porte-parole du gouvernement guinéen, a bien voulu se prêter à nos questions dont voici ci-dessous, l’intégralité de cette interview. Lisez …
Quelle est votre perception de la liberté de la presse en Guinée ?
La Guinée a fait d’énormes avancées en matière de liberté de la presse depuis que le secteur de l’information et de la communication a été libéralisé à la fin des années 80. Ensuite, depuis que les ondes elles-mêmes ont été libéralisées en 2006. Aujourd’hui, nous avons plusieurs radios, 5 ou 6 chaines de télévisions privées, sans compter le nombre de journaux papiers et de sites web.
Nous sommes peut être l’un des rares pays à n’avoir jamais restreint la liberté de la presse dans son expression, aussi bien en amont qu’en aval. Et malgré cela, nous ne sommes pas reconnus à juste titre mais, de grandes avancées ont été faites. Beaucoup de journalistes étrangers qui viennent en Guinée sont étonnés de la liberté de ton qui est laissée aux journalistes. Nous avons ratifié il n’y a pas très longtemps, que nous avons adopté une loi sur la liberté de la presse dépénalisant les délits de presse. Donc maintenant, il y a des évolutions à faire du côté des acteurs privés, de la société civile pour qu’ils comprennent le rôle de la presse. Mais également, je crois que c’est un grand travail à faire au niveau de la presse elle-même, pour qu’il y ait un peu plus de responsabilité dans le traitement de l’information.
La presse a-t-elle des limites ?
Oui tout à fait ! D’abord, il y a des limites éthiques, déontologiques, professionnelles mais également, administratives. Ceci étant, dès que vous y toucher, vous êtes soupçonnés de vouloir museler la presse. Donc, je crois que la meilleure des libertés, ce sont les limites qu’on se fixe soit même notamment, à travers les organes de régulations mais aussi et surtout, à travers les associations de presse, les syndicats des journalistes et autres formes d’associations de presse qui font très bien leur travail en Guinée. Et lorsque, eux, ils arrivent à réguler le travail de la presse, je crois que ça sera beaucoup plus facile pour les pouvoirs publics de gérer ce domaine si important de la démocratie.
En tant que porte-parole du gouvernement, est-ce qu’il vous arrive de ne pas tout dire à la presse ?
Oui ! (rire). Je crois qu’il n’existe dans aucun pays au monde où, à un moment donné, une autocensure ne se fait pas de la part des pouvoirs publics. C’est pour préserver la paix publique, préserver un certain nombre d’intérêts stratégiques pour ce qu’on appelle souvent, la raison d’Etat. Mais, sachant que de toutes les manières aujourd’hui, le monde dans lequel nous vivons avec le fort accès que les gens ont dans l’accès à l’information, il est très difficile de masquer un certain nombre d’informations. Maintenant, on peut retarder leur diffusion ou aménager leur diffusion. Mais, il arrive des moments effectivement, nous prenons soin de limiter l’expression d’un certain nombre d’informations pour éviter des réactions d’une population ou de certains acteurs socio-économiques qui pourraient déstabiliser le pays ou en freiner un certain nombre de règles. Donc, il arrive effectivement que nous autocensurions ou que nous demandions à la presse de manière tout à fait consensuelle, de surseoir ou d’attendre avant la diffusion d’un certain nombre d’informations. Et en général, ça se passe plutôt bien avec la presse guinéenne. De ce côté-là, il faut quand même la féliciter. D’un autre côté aussi, on en insiste mais parfois malheureusement, on constate des dérapages incontrôlés.
Quelle est la proportion que vous donnez à la presse guinéenne ?
Je pense qu’on est au-dessus de la moyenne. Malheureusement, la perception qu’on a, ça m’étonne que le dernier classement de Reporter Sans Frontière (RSF) nous a fait perdre de points. Cela m’étonne un peu. Nous faisons ces efforts là mais, le Reporter sans frontière ne nous a pas reconnu suffisamment. Imaginez ! l’lorsque vous analysez à l’échelle africaine et même mondiale, ce qui se passe au niveau des autorités de régulation, au niveau des pouvoirs judiciaires, la Guinée est quand même un des seuls ou un des rares pays à n’avoir jamais tenté un procès contre un journal, à n’avoir jamais fermé une radio, à n’avoir jamais octroyé une sanction à un journal,…Et pourtant, nous sommes au fond du classement du Reporter Sans Frontière.
C’est vrais qu’il y a eu des évènements malheureux dont, celui de Mandian Sidibé, du journaliste Diawara et la mort de Mohamed Koula Diallo mais, qui ne sont pas dus au pouvoir public.
Au même titre que des autres citoyens, nous faisons tout pour protéger les journalistes, bien que parfois, il y a des dérapages mais, qui ne sont pas du fait du gouvernement. Et la seule et rare fois que les journalistes sont agressés par les forces de l’ordre, elles ont été automatiquement sanctionnées par les autorités compétentes. Donc, nous trouvons injustes ce classement de Reporter Sans Frontière, mais ceci n’est qu’une motivation supplémentaire pour faire encore mieux, pour la liberté de la presse, en espérant que les associations de presse et les responsables de ses associations sauront également faire la part des choses et prendre leurs responsabilités pour que la Guinée ait une presse plus responsable.
Propos recueillis par Fodé Sita Camara
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